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  Journalsemilitteraire

Le concile de pierre (J.C. Grangé)

8 Mars 2008 , Rédigé par Angua Publié dans #Lectures curieuses

Oui, j'ai lu ça. Presque en entier. J'avoue, j'ai lu la fin en diagonale parce que l'agacement montait et que je ne voulais rien casser autour de moi.

A ma décharge, je suis prof en ZEP depuis une semaine avec un emploi du temps de folie qui met mon cerveau à rude épreuve, et mardi soir, j'étais en quête d'une Bonne Merde facile à lire. Un truc drôle. A la Sire Cédric, où j'aurais pu me moquer méchamment de chaque page et prendre finalement beaucoup de plaisir.

Ce bouquin attendait sagement rangé dans la bibliothèque, arrivé là sans que je sache trop comment. Tout neurone et tout esprit critique éteint, je m'y suis plongée soulagée de ne pas avoir à réfléchir. 
Remettons les choses en contexte. Je venais de passer deux journées entières avec des gamins certes attachants, mais très remuants, demandeur d'une quantité d'attention que j'ai par moment du mal à fournir. Et je suis prof principale d'une classe d'accueil dans un collège où l'administration est absente, détail qui a son importance. 
Bref. Prof de français, je sais faire à peu près. Prof de Français pour des primo arrivants, à peu près aussi. Assistante sociale et conseillère d'orientation, là, je débute...

Donc, que ce soit clair: j'étais extrèmement fatiguée. Incapable de décoller de mon canapé comme ça m'était rarement arrivé après une journée de cours. Du coup, j'ai failli prendre plaisir à ce roman.

concile.jpgMais s'il y a bien un truc qui m'insupporte, c'est qu'on me prenne pour une imbécile. Pour une idiote décérébrée qui ne connait rien à rien et ne se nourrit que de films à grand spectacle.
Dès le début, j'ai failli m'agacer. Une héroïne victime d'une mère odieuse jusqu'à la caricature. Le poncif dans toute sa puissance.
Une héroïne qui, quelques années plus tard, se met aux arts martiaux. 
C'est là que mes poils ont commencé à se hérisser. Même si je ne pratique plus aujourd'hui, j'ai 10 ans d'aïkido derrière moi, et je connais bien un certain nombre d'autres disciplines, bref, je sais ce qui est de l'ordre du possible. 
Mais j'ai persisté.
Et me suis endormie.

Le lendemain, j'ai lu qq pages dans le bus. Les idées ailleurs. Je lis dans les transports en commun pour me sortir de ma journée, et là, je suis arrivée chez moi en digérant encore l'info du jour ("Au fait Melle Angua, le petit X va passer en conseil de discipline. Il a amené de la drogue au collège. De l'héroïne". Moi, ça me perturbe un peu quand même). Mon cerveau a donc refusé de se concentrer sur Le concile de pierre, mais rassurez-vous, j'ai pu survoler ces 40 pages sans vraiment les lire sans être gênée pour comprendre la suite.

Sans que je m'en aperçoive, le Magazine Littéraire du mois a pris le relais ce soir-là..

Et hier, seule dans une chambre d'hotel, j'ai fini
Le Concile de pierres.

Je parlais avec affection de la Bonne Merde de Sire Cédric, parce qu'au fond, la naïveté était touchante et l'ensemble drôle.
Là, j'éprouve de la colère, de la rage contenue. Pour moi, ce roman est une Vraie Merde. Du prêt-à-lire qui se régurgite et s'oublie vite, très vite parce qu'il n'y a rien à en retenir. 
Pourquoi tant de haine?
Parce que rien ne tient debout dans l'histoire. Un peu de conspiration, ok, il en faut dans un thriller, mais trop, c'est trop. Une héroïne très douée en techniques de combat, pourquoi pas, mais qui gagne systématiquement par des coups rocambolesques face à des pros sur-entrainés, faut pas déconner. Un peu de magie, d'accord, mais le délire de la fin m'a rappelé les pires épisodes de Manimal (notez, j'aimais bien Manimal dans mon enfance. Mais au moins, c'était une Bonne Merde). Un voyage improvisé au bout du monde, je veux bien, mais que l'unique bon guide spécialisé vous attende à l'aéroport, non. Quelques entorses au fonctionnement de la police, c'est un classique... Mais là, on est dans la bavure du début à la fin.Ques les hasards de la vie soient heureux, c'est possible, mais que chaque pièce s'emboîte aussi précisément dans le parcours du personnage... Non, un effort de suspens, un peu d'imagination auraient amélioré les choses! 
En plus, l'auteur se sent obligé de prendre son lecteur pour un crétin sans culture aucune. Ah bon, les idéaux humains et le communisme ont été à l'origine de morts? Sans blague, les hommes se comportent parfois comme des prédateurs? Vraiment, une femme docteur a un peu de culture générale? C'est sûr, c'est froid la steppe?
Je m'abstienrai d'épiloguer sur le personnage. J'ai toujours du mal à imaginer que quelqu'un qui a un haut niveau d'étude perde 90% de son cerveau quand il lui arrive une m... . Ou qu'un être humain normalement constitué s'extasie si vite sur son prochain. Surtout si le créateur de l'être humain en question a épilogué pendant quatre chapitres sur le perpétuel célibat dudit personnage.

Mais le pire...
C'est cette impression de sous-culture, de lecture tout faite et prête à consommer comme un autre produit. Une histoire calibrée, au rythme impeccable d'un point de vue technique. Je comprends pourquoi des milliers de gens ont lu ce livre avant moi, voire l'ont aimé... peut-être parce qu'ils n'aiment que ce genre de littérature (re-admettons), mais surtout parce qu'ils n'ont pas l'habitude de LIRE. De lire vraiment, des textes forts, porteurs de sens, qui font rêver, réfléchir, divaguer l'esprit, sortir de la réalité pour mieux y réfléchir à son retour, bref, lire pour le plaisir...
Grangé utilise ici tous les trucs hollywoodiens et littéraires vus et revus, et d'une efficacité redoutable pour donner envie de jeter son cerveau. Mais le mien a refusé de s'éteindre assez longtemps pour se laisser avoir...et s'est mis dans une colère noire.

La prochaine fois qu'il aura besoin de repos, ce sera Molière (oui, ça me repose les idées). Ou un auteur jeunesse, ou une Bonne Merde. Mais ça, plus jamais.

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N
On dira ce qu'on voudra, Grangé est un auteur de talent. Mais Le concile de pierre n'est pas l'idéal pour récouvrir cet écrivain. Son meilleur est son premier: Le vol des cigognes, un excellent thriller, haletant et documenté. Si tu veux redonner sa chance à cet auteur qui n'écrit pas que des "Bonnes merdes"...
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A
<br /> J'y reviendrai peut-être... mais pas tout de suite, je reste échaudée par ce roman vraiment pas concluant pour moi.<br /> <br /> <br />
O
J'aimais bien Manimal moi aussi (moins que Buck Roger toutefois). Je me suis toujours demandé comment il faisait pour se transformer en oiseau ou en serpent tout en perdant son poids d'homme. On a beau être minots à ces âges là, on se pose quand même ce genre de question.
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A
Et oui, et en se posant ces questions justement, on va fouiller dans les bouquins qui ont l'air scientifique... et on tombe d'autant plus vite dans la SF!Mais j'avoue que petite, la question qui taraudait était plutôt de l'ordre de "Mais bon, sang, comment s'y prendre pour faire pareil?"
T
Excellente chronique, L. Un pur régal :-)Parfaitement équilibrée entre l'anecdotique (l'indigente lecture) et l'essentiel (ta vie), elle m'a donné envie... de ne pas lire l'ouvrage en question, bien sûr.Thierry.
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A
Merci beaucoup pour ces compliments, je me suis sentie rougir à leur lecture!Ils me rassurent sur ma capacité à écrire des choses cohérentes, dont je doute parfois en rentrant d'une journée dans cet établissement!En tous cas, l'objectif est atteint: permettre à quiconque aurait l'envie de se lancer dans ce roman de le faire en connaissance de cause. Et justement ne pas le faire.