La Horde du Contrevent (Eric Henninot)

Le roman d'Alain Damasio a marqué ma vie de lectrice, et ma vie tout court, qui en serait pas ce qu'elle est si je ne l'avais pas lu, et n'en avais pas parlé brièvement quelque part dans les méandres du net. Parfois, je pense à la relire, avec la crainte de ne plus être emportée aussi loin, ou de découvrir que les souvenirs qu'il m'a laissé sont erronés. La crainte d'y replonger aussi. Car La Horde du Contrevent est l'un des textes les plus immersifs que je connaisse, à ranger aux côtés des Grands de la littérature, et je répète depuis ma lecture que ce titre DOIT faire partie des oeuvres qui resteront du XXIe siècle. Lecture qui a plus de 10 ans...

Autant dire que j'étais réservée face à la BD. Pour les malheureux qui ne connaitraient pas le texte, La Horde est un roman polyphonique, où le pouvoir évocateur des mots est poussé à son paroxysme, une prouesse littéraire doublée d'un roman d'aventures et de philosophie. Il faut être un grand barjot pour ne serait-ce que penser à le mettre en image. Damasio écrit en introduction qu'on "ne juge pas la valeur d'une adaptation à sa fidélité au support original [mais] à la qualité de sa trahison." Peut-être. Dans mon cas, c'est en acceptant d'aborder l'album comme une histoire autre que j'ai pu l'ouvrir.

Cet angle de lecture fut impossible à conserver. Chaque planche m'évoque un souvenir de lecture, une émotion du texte d'origine. Les personnages sont d'une beauté violente, et Caracole... ah, Caracole. Rien que pour lui, je pense relecture. Une envie de tout plaquer pour m'enfermer deux jours dans mon salon. L'aspect que lui donne Henninot n'a rien, mais alors strictement rien à voir avec ce que je voyais, et pourtant, c'est bien lui. Golgoth est bien loin par contre, devenir visage le limite à sa sauvagerie braillarde et le rend presque détestable...

Caracole, l'un des plus grands troubadours de la littérature.

Je tombe dans le jeu de la comparaison, finalement. En tout cas, je suis bien au rayon des expériences de lecture, et si je doute qu'un béotien se fasse emporter de la même manière, je sors rêveuse de ce premier tome.

Pour un aperçu :

Et pour un autre, avec ITW de l'auteur (où je découvre que si je n'avais aucun souvenir d'un événement... c'est parce qu'il n'était pas dans le roman !) :https://www.journaldugeek.com/2017/10/25/interview-du-roman-a-la-bande-dessinee-comment-eric-henninot-a-travaille-pour-adapter-la-horde-du-contrevent/